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DU CINÉMA COMME ART ABOLITIONNISTE PAR GEOFFROY DE LAGASNERIE

Dernière mise à jour : 7 juin

DIALOGUE • IDÉES

LUNDI 5 MAI 2025

CINÉMA LE BALZAC • 20H30


Dans son nouvel ouvrage « Par delà le principe de répression » consacré à l’abolitionnisme pénal, Geoffroy de Lagasnerie mobilise très régulièrement des exemples tirés du cinéma pour réfléchir autrement sur la question du crime, de la punition, de la responsabilité et de la justice. 


Cela a donné à l’association HORSCHAMP le désir d’organiser une soirée sur son rapport au cinéma et plus généralement sur la manière dont cet art peut nous permettre d’adopter une vision anti-punitiviste du monde : un autre rapport à la violence et au crime, à la culpabilité et à la répression. Il s’agira dans cette soirée animée par Léolo Victor-Pujebet de partir d’extraits de films pour se demander en quoi le cinéma peut être le lieu d’une expérience morale et politique abolitionniste.


Dialogue suivi d’une séance de dédicace.






Le cinéma comme contre monde


Dans nos sociétés saturées de dispositifs judiciaires, le cinéma demeure cet étrange lieu où l’on regarde longuement des corps qui blessent et qui sont blessés, où la violence circule sans clôture, sans appel, sans légende. Comme si l’image bougeait plus vite que les mots qu’on voudrait lui coller. Cette idée du cinéma ne dit pas : voilà un criminel, voilà une victime. Il laisse survenir un geste, une situation, une intensité qui déborde l’assignation. C’est ce débordement qui nous intéresse. Et c’est précisément dans ce débordement que s’esquisse peut-être une autre manière d’habiter le monde, sans recours à l’ennemi, sans adossement au verdict.


L’abolitionnisme n’est pas une utopie abstraite. C’est une pratique du regard. Une manière de désactiver les automatismes perceptifs à travers lesquels nous pensons la faute, le mal, la justice. Et si la justice, comme le dit le livre de Geoffroy de Lagasnerie, est une entreprise d’invention - invention de crimes, invention de coupables, invention de figures légitimes du pouvoir - alors le cinéma, parfois, se tient dans l’exact mouvement inverse : il désinvente. Il retire. Il défait les plis, laisse un espace où les actes ne s’adossent plus immédiatement à des concepts prémâchés.


Ce que nous appelons ici un contre-monde, ce n’est pas une projection idéalisée. C’est un monde sans catégorie fixe. Un monde sans hiérarchie automatique des affects. Un monde où l’on peut, pour un instant, regarder un agresseur sans lui accoler l’idée de monstruosité. Où l’on peut entendre un silence sans qu’il soit interprété comme un aveu. Où l’on peut voir une scène et n’y chercher ni faute ni rachat, mais une sorte de vérité nue, qui demande à être pensée autrement.


Le cinéma ne remplace aucune institution. Il ne guérit rien. Il ne répare pas. Il déplace. Il crée un lieu où le temps du jugement est suspendu. Un lieu qui n’est pas régi par la demande de condamnation ou de pardon, mais par l’apparition lente d’une autre logique du sensible. Il arrive qu’un film, sans discours, sans programme, donne accès à cette expérience : une action s’accomplit, une personne vacille, quelque chose nous émeut - et pourtant aucune catégorie ne suffit à dire ce que cela signifie. C’est cela, peut-être, que le cinéma partage avec l’abolitionnisme : l’effort pour produire une compréhension non punitiviste de ce qui nous blesse.


Le 5 mai, nous traverserons ces contre-mondes cinématographiques où le crime est dépouillé de sa puissance mythologique, où la justice est rendue faillible, où la pensée punitive se défait à mesure que les images nous traversent. Nous explorerons ces formes qui ne nous demandent pas de croire à autre chose, mais de regarder autrement.

Le cinéma ne répare rien. Mais il déprogramme. Il rend visibles d’autres attaches, d’autres valeurs, d’autres appartenances. Il fabrique, peut-être, un monde habitable pour celles et ceux qui ne peuvent survivre dans celui qu’organise le droit.


Léolo Victor-Pujebet 



DU CINÉMA COMME ART ABOLITIONNISTE

PAR GEOFFROY DE LAGASNERIE


DIALOGUE • IDÉES

LUNDI 5 MAI 2025

CINÉMA LE BALZAC • 20H30



 
 
 

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