top of page

L'HEURE PASSÉE AVEC THOMAS JOLLY

Dernière mise à jour : il y a 1 jour

DIALOGUE • THÉÂTRE

JEUDI 15 MAI 2025

STUDIO MAGMA


Pour sa première émission radiophonique en partenariat avec le Studio MAGMA, HORSCHAMP est heureux de convier le metteur en scène Thomas Jolly. Une conversation autour de la "folie des grandeurs", animée par Léolo Victor-Pujebet et Mathieu Morel.



L’enfance de Thomas Jolly dessine un espace d’écart, où la parole cherche sa scène, où le corps invente ses appuis. Très tôt, le théâtre s’est imposé comme un refuge vivant, une chambre de résonance où se nouaient la fragilité et la projection. Dans le silence d’une pièce, un enfant convoque des mondes. Chaque geste devient la preuve qu’un autre rythme est possible, qu’un regard peut tout déplacer, qu’une adresse suffit à déplacer les murs. Ce n’est pas l’apparence qui attire, mais la capacité à s’altérer, à traverser des formes pour se déployer autrement.


Rien n’est fixe dans sa manière de faire théâtre. L’identité s’y délie, s’y transforme, s’y éprouve dans le mouvement. Le rôle ne recouvre rien, il propose une traversée. Le jeu devient un champ d’expérience, un terrain pour exposer une présence mouvante, jamais assignable. La scène se déplie comme un lieu de tension douce entre les intensités du monde et celles du corps. L’acteur ne se protège de rien, il se risque. Chaque mot, chaque mouvement, chaque silence engage la totalité d’un être à l’endroit exact où il se découvre à travers l’autre.


Dans Henry VI, Thyeste, les cérémonies, ou H6M2, il ne s’agit jamais de spectaculaire. Chaque forme se dresse comme une tentative d’ajustement à une vision, une volonté de répondre à la puissance d’un texte par un espace qui l’honore. Le vertige n’est pas un effet recherché : il est contenu dans l’exigence même de suivre jusqu’au bout une intuition. L’échelle des projets naît de cette fidélité. La durée, la tension, l’ampleur répondent à une nécessité intérieure. Shakespeare apparaît moins comme un monument que comme une force active, une matière à transformer en adresse vivante.

Le théâtre devient alors un dispositif de pensée en mouvement. Il ne transmet pas, il déplace. Il ne cherche pas à instruire, il fait place à l’irruption du sens. La position du spectateur se transforme, car le regard n’est plus invité à juger ou admirer, mais à suivre une vibration, à accepter d’être atteint. À travers ce geste, une politique s’invente : celle d’un art qui façonne un espace commun, qui reformule la cité à partir d’une écoute.


H6M2 condense cette manière d’agir. Une forme vive, ouverte, dépouillée. Une projection minimale, traversée d’éclats. Le théâtre n’y précède pas l’œuvre, il en prolonge l’élan. Il n’énonce pas, il entrouvre. Il crée un seuil, une respiration, un battement. C’est dans ce battement que la rencontre se joue, que le politique se réinvente, non dans les thèmes, mais dans la structure même de l’échange.

Quand Thomas Jolly parle de veilleuses dans l’obscurité, il engage une direction esthétique. Il ne cherche pas à s’opposer, il éclaire. Chaque projet devient un tissage de matériaux, de langues, de cultures, sans hiérarchie ni ironie. Sénèque, Starmania, le métal, le voguing, la tragédie et les danses populaires composent une cartographie singulière. Le monde ne se distribue pas en registres : il s’agence en lignes d’intensité. Le théâtre accueille ces tensions et les transforme en figures visibles.


Ce théâtre pense par la scène. Il n’illustre rien. Il active des situations de vérité. Il installe des formes où la pensée devient perceptible, presque tactile. Une lignée se dessine, non académique mais sensorielle, qui traverse Artaud, Castellucci, et tous ceux pour qui la scène déplie un monde plutôt qu’elle ne le commente. Il n’y a pas de message, mais une situation de lumière. Une manière d’habiter la complexité avec des corps, des voix, des musiques, des textes, qui respirent ensemble.

La grandeur, chez Jolly, ne se proclame pas. Elle se manifeste dans la tenue, dans l’amplitude d’un geste qui refuse les rétractions. Elle engage, elle ouvre, elle propose une intensité. Elle ne réclame rien, mais transforme l’espace autour d’elle. Elle déplace les attentes. Elle appelle à se tenir droit, même lorsque le sol se dérobe.


Et peut-être que le théâtre, alors, recommence. Chaque soir. Dans le silence rassemblé, une possibilité surgit. Une flamme passe. Un appel circule. Et l’on comprend que l’essentiel ne se dit pas. Il s’éprouve.


Et puis aux mauvaises langues, nous leur dirons : "Ça ira. Les aristocrates, on les pendra."



CONVERSATION AVEC THOMAS JOLLY


DIALOGUE • THÉÂTRE

JEUDI 15 MAI 2025

STUDIO MAGMA


événement réservé aux adhérents HORSCHAMP



 
 
 

Comments


logo horschamp white.png
bottom of page