L'HEURE PASSÉE AVEC SIMON JOHANNIN
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DIALOGUE • LITTÉRATURE
LUNDI 8 DÉCEMBRE 2025
STUDIO MAGMA
Pour son cycle radiophonique en partenariat avec le Studio MAGMA, HORSCHAMP est heureux de convier l'auteur Simon Johannin.
Une conversation qui traverse son rapport à l’écriture, la manière dont ses livres naissent, les forces qui les poussent, et ce que signifie continuer à écrire lorsque les formes changent, lorsque la poésie devient un espace où l’on cherche à comprendre ce qui travaille une vie.
« Pour qu’une chose soit, demandai-je alors, la ferme conviction qu’elle est, suffit-elle ? Il répondit : « les poètes le croient. Cette ferme conviction, dans les siècles d’imagination, remuait les montagnes ; mais peu nombreux sont ceux capables, en quoi que ce soit, d’une conviction véritable. »
Les mots de William Blake, le mariage du ciel et de l’enfer, pour évoquer le manifeste poétique qui alignent en hérédité les vers et leurs poètes, depuis la nuit des temps. L’outrecuidance, la présomption, la futilité, semble aussi, avec le siècle catastrophe et l’actuel, fait de flash, de bruits et de fureurs, décréter la poésie obsolète, aveugle, stérile, et ses auteurs, d’un autre temps, ramené à la séduction légère que peut susciter le pitre qui amuse et agace, à qui l’on reconnaitra tout de même, la capacité, mieux que personne, à dire je t’aime. Je t’aime, c’est peut ce que voudrait dire le monde à la poésie : « Je t’aime, d’être en vie, Je t’en veux, De ne pas mourir ». Ces vers, ce sont maintenant ceux de Simon Johannin, qui a choisi la poésie. Le soleil. Les mots. La lumière. La mer. La courbe des êtres. Les vers et les fantômes. Ou bien peut être, sont-ce les fantômes qui le choisissent, et qui lui parlent, à l’instar du personnage de son dernier roman, accablé par les voix d’outre-tombes, qui s’élèvent et montent du fond des eaux, « n’étaient plus que vibrations, des fréquences presque agréables. Se fondaient au vent, comme une ode adressée à un jeune Dieu, ignorant encore, ses cardinaux et ses bombes. » Ecrivez, vous dans le fin chemin des anges.
Choisit-on la poésie, ou bien est ce la poésie qui nous choisit ?
Que reste-t-il du caractère sacré qu’elle revêtait ? Que reste-t-il, plus simplement, de ce qui est sacré, et de ce qui fut. Dans le monde de Simon Johannin, sa poésie, sa prose, ses romans, le monde s’essouffle, le soleil se couche, la nature fait jaunir et rougir les feuilles, la brume recouvre, quelques rides apparaissent aux coins des yeux, c’est l’automne déjà, bientôt la fin, mais allons-nous dormir, nous enterrer ? Pourquoi ne pas plutôt embrasser la vie ? Ecrire, faire l’amour, se bagarrer, boire, danser danser, avec un taz, avec un ami, avec une chemise sale, avec un frère ou une avec une femme, belle parce qu’elle aussi, la poésie l’a choisit, belle parce que sous les feux de la nuits, elle transpire, belle parce qu’elle est ivre, parce qu’elle est amoureuse.
On aime, dans les récits de Simon Johannin, comme dans les siècles d’imagination, à en remuer les montagnes, le romantisme est choisi, brandit. Omnia Vincit Amor, L’amour triomphe de tout, disait le poète, il y a déjà, deux mille ans. Alors l’amour se décline en parcelle nouvelle, se part de ses atours modernes, puisque, comme le voulait Rimbaud, Il doit être réinventer. Qui de mieux que les béats grands enfants, Peter Pan, du 21ème siècle, pour redéfinir les contour et le pourtour de l’amour ! Qu’ils vivent de joie et d’amitié, ceux d’à côté, enfin, peuvent s’exprimer, la marge l’emporte, se déploie, donne sa liberté, à observer, à questionner et peut être, à embrasser. Les blessés, les enfermés, les boiteux, les mal aimés, ceux qui cassent les lignes et se rient, d’avoir peur, du danger. Le bord, de la ville, de la vie, du gouffre. C’est ici, que les histoires concoctent l’amour, point de mièvrerie familiale, de patriotisme ou d’amour de Dieu, ils sont amoureux, de leurs amis, de leurs amantes, du soleil et de la nuit.
Ainsi créons nous, à force de poésie, dans vos vers et dans nos vie, peut être, le nouvel art de vivre. Même pas peur, de la mort. Vivre c’est mourir, on ne se protège pas, Siamo tutti in pericolo, nous sommes tous en danger, avertit, Pasolini, au seuil, de l’autre vie.
Sous la chaleur croupissante, de l’été des charogne, votre premier roman, tout autant que sur l’asphalte, avec Nino, dans la nuit. À Paris, à Marseille, avec votre plume, Ici commence un amour.
Un dialogue s’ouvre aujourd’hui, entre vous et nous, et nous voulons aussi vous déclarer notre amour. Vos livres nous racontent et nous piquent le coeur, depuis toutes ces années, vos vers redonnent l’envie et l’espoir, de regarder le monde et ses ombres, avec l’oeil du poète, le courage de ce choix qui est le votre, choisir cet art, choisir la vie, la douceur, mais aussi, auteur éclairé, lucide, pasolinien, la brutalité du monde, sa réalité, que vous tentez de rentre par la littérature, et de nombreux et créatifs, procédés.
« Les jours et les besognes prolifèrent sans transition, le temps est une fièvre constante, harcelante, qui ne laisse presque jamais de répit et presque par hasard, tant le hasard n’a rien à voir ici avec un destin, une destinée. C’est entre autres de cela que ces gamins sont exclus : du possible, de toute utopie. » Les mots de Pasolini et ces gamins, ces ragazzi, éloignés du possible, habitent aussi, votre oeuvres littéraire et poétique.
Le poète, et celui que vous êtes, observe la nature grandir et mourir, s’émerveille de sa capacité à créer et à détruire, il rend compte de la maitrise de son mouvement biologique naturel, ancestral, influencer les êtres et les rêves, emprisonner, dévorer, pénétrer, et entrainer sur les longs chemins de la décomposition et le vent des cieux. Il décrit la ville, comme on décrit une forêt, hantée et blafarde sous la lune froide, et ces habitants, comme autant de sangliers, de biches, de merles et de serpents. La nuit, aux oiseaux de nuits, le jour, aux tisseurs, aux glaneurs, aux chasseurs.
Et malgré tout, dire, au regard de l’autre :
Je t’aime d’un amour aussi fort
Que ma main sur ta bouche
Je t’aime d’avoir voulu
Te cacher dans la mienne
Quelques vers de votre recueil, la dernière saison du monde.
« Les grands moments sont rares
Dans les ruelles confuses
Mais certains
Sur le rebord du risque
Chuchotent au cran qui s’ouvrent
Le long de la cambrure »
Des vers, à présent extraits, de votre recueil, que vous intitulez Nous sommes maintenant nos êtres chers
Ce que nous voulons peut être interroger aujourd’hui, c’est le rôle de la poésie. Ce que sont, nos êtres chers. Ce qu’est le beau et le laid. Il est aussi, en poésie, en poésie française chez Baudelaire, le Spleen et l’idéal, dans lequel nous pouvons lire :
« Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l’abîme,
Ô beauté ? Ton regard, infernal et divin,
Verse confusément le bienfait et le crime,
Et l’on peut pour cela te comparer au vin.
De satan ou de Dieu, qu’importe ? Ange ou Sirène,
Qu’importe, si tu rends, - fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine ! -
L’univers moins hideux et les instants moins lourds ? »
L’aspiration de Baudelaire c’est la beauté, qu’importe ses contraires et ses appréciations, il en va d’embellir le monde, la poésie comme hymne à la beauté, est-ce là aussi l’intention que nous puissions prêter à vos vers, Simon Johannin, que peuvent-ils extraire ? quel rôle doit on donner à la poésie ?
« Nous vivons à une époque d’actualité, alors que la poésie est « l’intemporalité ». Elle est inactuelle. » Mathématiques supérieures, langage suprême « Je sais, disait Cocteau, que la poésie est indispensable mais je ne sais pas à quoi. »
La poésie est-elle, indispensable ? Et surtout, puisque nous avons vocation à faire aujourd’hui votre connaissance, Simon Johannin, qu’est-ce qu’un poète ?
L'HEURE PASSÉE | HORSCHAMP x Studio MAGMA.
conversation animée par Mathieu Morel et Aurélien Deniel
CONVERSATION AVEC SIMON JOHANNIN
DIALOGUE • LITTÉRATURE
LUNDI 8 DÉCEMBRE 2025
STUDIO MAGMA














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