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Jean-Marie Straub et Danièle Huillet, rétrospective intégrale

Dense, puissante, érudite, l’œuvre cinématographique unique façonnée par Jean-Marie Straub et Danièle Huillet puise sa source dans leur rencontre, au milieu des années 50. « Un couple de cinéastes responsables d’une des œuvres les plus radicales, les plus exigeantes, les plus excitantes pour l’esprit, les plus belles aussi de ce que l’on a appelé le cinéma moderne », rappelait Jean-François Rauger dans un hommage publié dans Le Monde, à la mort de Danièle Huillet, en 2006. On ne saurait mieux dire tant, cinquante ans et trente films plus tard, leur travail conserve sa force et son actualité.



Dans une économie toujours modeste, les Straub ont poursuivi sans fléchir leurs recherches esthétiques, à travers les pays, de l’Italie à l’Allemagne en passant par l’Egypte et la France, et surtout les œuvres littéraires et musicales dont ils se sont inspirés pour mieux affirmer leur engagement politique, celles de Bertolt Brecht, Cesare Pavese ou encore Franco Fortini en tête. Mouvements de caméra minimalistes, direction d’acteurs ou de non professionnels rigoureuse, mise en scène du son et de la musique inédite, rapport à la nature omniprésent, les Straub n’ont cessé d’aiguiser leur expression filmique pour dénoncer toutes les violences du 20ème siècle : permanence du fascisme, immanence du capitalisme, résurgence des conflits, notamment au Moyen-Orient.

« Chaque Straubfilm est un relevé – archéologique ; géologique ; ethnographique, militaire aussi – d’une situation historique où des hommes ont résisté [...] les Straub pourraient dire : n’existe pour sûr que ce qui résiste », écrivait le critique Serge Daney. Découvrir, redécouvrir aujourd’hui Othon (1969), Moïse et Aaron (1974), Trop tôt, trop tard(1980/81) ou encore Ouvriers, paysans (2000), c’est mesurer le nécessaire mouvement de l’époque et la formidable acuité des Straub à nous le révéler

Jean-Marie Straub poursuit seul ce travail depuis 2006. Il a réalisé plus de quinze courts métrages et un long, tournés pour la plupart en numérique. Présent sur la scène artistique mondiale, notamment à la Biennale de Venise, en 2015, ou encore au MoMA de New York, pour une rétrospective, en mai 2016, il ne cesse d’agrandir son champ d’expérimentation. Alors que le Centre Pompidou mettra l’ « Arte povera » à l’honneur, à partir du 8 juin prochain avec l’exposition Un Art Pauvre, et que deux films réalisés avec Danièle Huillet, Introduction à la "Musique d'accompagnement pour une scène de film" , d’Arnold Schoenberg (1972) et Toute révolution est un coup de dés(1977), s’apprêtent à rejoindre les collections du Centre Pompidou, je suis particulièrement fier que notre institution consacre l’œuvre de ces artistes totaux, Danièle Huillet et Jean-Marie Straub. La présence de ce dernier, dans nos murs, est inestimable.

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